Chikungunya à La Réunion : retrait du vaccin pour les plus de 65 ans en raison d’effets indésirables

Le 26 avril, les autorités sanitaires ont décidé d’exclure temporairement les personnes âgées de 65 ans et plus de la campagne de vaccination contre le chikungunya à La Réunion. Cette mesure fait suite à plusieurs effets indésirables graves, dont un décès, survenus chez des patients âgés fraîchement vaccinés. Ce retrait soulève de nombreuses interrogations sur l’innocuité du vaccin Ixchiq et sur les risques potentiels pour les populations les plus vulnérables.

Une décision motivée par des effets secondaires préoccupants

Face à une recrudescence de cas depuis le début de l’année 2025, la Haute Autorité de Santé (HAS) avait initialement recommandé le déploiement d’une campagne de vaccination ciblant en priorité les personnes âgées de 65 ans et plus, population jugée à risque face au chikungunya.

Mais le signalement de trois effets indésirables graves — dont un décès — recensés chez des personnes de plus de 80 ans vaccinées avec le nouveau sérum a conduit les autorités sanitaires à suspendre la vaccination dans cette tranche d’âge. Ces patients présentaient des symptômes inquiétants : fièvre élevée, douleurs musculaires et articulaires intenses, céphalées sévères, et dans certains cas, éruptions cutanées, symptômes typiques de formes graves de la maladie.

Vaccination maintenue pour les adultes à risque

En parallèle, les autorités sanitaires ont confirmé le maintien de la campagne de vaccination pour les personnes âgées de 18 à 64 ans présentant des comorbidités. Il s’agit notamment de maladies cardiovasculaires, d’hypertension artérielle, d’insuffisances cardiaque, rénale ou respiratoire, de diabète ou encore d’obésité.

Aucun incident grave n’ayant été rapporté dans cette population jusqu’à présent, la HAS souligne qu’un arrêt total de la vaccination serait préjudiciable, compte tenu des formes graves observées, y compris chez des individus plus jeunes.

Le vaccin Ixchiq : une solution sous surveillance

Le vaccin administré, appelé Ixchiq, est un vaccin vivant atténué contenant une version modifiée du virus chikungunya. Il s’agit d’un alphavirus transmis à l’homme par les moustiques du type Aedes albopictus (moustique tigre) et Aedes aegypti. Ce vaccin nécessite une seule injection pour offrir une protection immunitaire.

Ixchiq a obtenu une autorisation de mise sur le marché européenne en juin 2024, et américaine en novembre 2023. Son évaluation clinique repose sur quatre études impliquant 3 610 participants, dont seulement une faible proportion de plus de 65 ans. Ce faible échantillon suscite désormais des interrogations quant à la fiabilité des données de sécurité dans cette catégorie d’âge.

Des effets indésirables passés sous le radar ?

Selon le professeur Jean-Daniel Lelièvre, chef du service d’immunologie clinique à l’hôpital Henri Mondor, les vaccins vivants atténués sont généralement mieux tolérés par les individus jeunes que par les seniors. « Il est bien connu qu’il existe un risque accru d’effets indésirables après l’administration de vaccins vivants chez les personnes âgées, notamment celles souffrant de comorbidités telles que le diabète ou l’insuffisance cardiaque », a-t-il déclaré dans un entretien accordé à BFM.

Il avance également que le nombre limité de participants âgés inclus dans les essais n’aurait pas permis de détecter des effets secondaires rares mais graves. Environ 400 sujets de plus de 65 ans auraient été inclus dans les études cliniques, ce qui limite la robustesse statistique de l’analyse des risques pour cette population.

Aux États-Unis, le CDC (Centers for Disease Control and Prevention) a également signalé cinq hospitalisations après administration du vaccin chez des personnes âgées, liées à des complications cardiaques ou neurologiques. Bien que les cas soient encore à l’étude, ces évènements renforcent la nécessité d’une surveillance accrue et d’investigations complémentaires.

L’urgence de renforcer les mesures de prévention

Depuis janvier, neuf décès attribués directement au chikungunya ont été déplorés à La Réunion, toutes chez des personnes âgées de plus de 70 ans. À cela s’ajoutent 57 cas graves caractérisés par des défaillances organiques sévères, confirmant que la maladie représente une menace sérieuse pour les personnes fragiles.

Durant la semaine du 21 au 27 avril, l’épidémie a généré plus de 23 000 consultations et 332 passages aux urgences. Santé publique France rapportait en parallèle 20 autres décès en cours d’investigation, susceptibles d’être liés à l’infection.

Dans ce contexte, la prévention contre les moustiques vecteurs de la maladie reste cruciale. Deux gestes simples sont recommandés : éliminer toutes les eaux stagnantes susceptibles d’abriter les larves et adopter des protections physiques comme les vêtements longs, les répulsifs cutanés, et l’usage de moustiquaires, notamment durant la nuit.

Source : Santé publique France, HAS, CDC, BFM Santé • Pour en savoir plus sur les effets secondaires d’Ixchiq, visitez le site du CDC.